dimanche 26 juin 2022

PATRICK VINCENT aka PAT DAIR



1- Peux-tu te présenter en quelques mots ?

Je viens d’avoir 61 ans, je suis natif de Marseille où j’ai grandi dans un quartier populaire. Je vis depuis une vingtaine d’années dans le Vaucluse. Professionnellement, après avoir travaillé comme portier dans un night-club du quartier turbulent de l’Opéra pendant mes études, j’ai occupé depuis diverses fonctions en sécurité privée en tant qu’opérateur puis encadrant, avant de devenir responsable sécurité d’une Administration. Poste que j’occupe depuis 17 ans avec un périmètre comprenant la sécurité, la sûreté et la santé au travail. Je suis aussi formateur en secourisme.


2- Quel est ton parcours dans les sports de combat et les arts martiaux ?

J’ai commencé à pratiquer il y a maintenant 47 ans par le Karate, suite à un cambriolage alors que j’étais présent et qui me valut mon premier coup de lame et ma première cicatrice, trois jours après mon quatorzième anniversaire. J’ai décidé, ce jour-là, de ne plus jamais subir la violence d’autrui.


Pourquoi le Karaté me diras-tu ? Eh bien nous étions en pleine période Dr Justice et Bruce Lee et le Karaté bénéficiait alors d’une aura d’efficacité. Il faut dire qu’on était loin, dans les clubs, de l’absence de contact tant raillée aujourd’hui et qu’on y trouvait de sacrés clients. Puis ce fut le mouvement du full-contact qui réclamait plus d’engagement en combat, puis le kick-boxing et enfin le Muay-Thai, avec toujours le raisonnement communément admis que plus c’était dur, plus c’était efficace en situation. Pourtant, si les sports de combat sont très intéressants pour l’endurcissement et la gestion du stress en combat, ils n’en demeurent pas moins codifiés par des règles, règles qui n’existent pas en situation. Après quelques titres régionaux en full et une finale nationale en Taekwondo, j’ai cessé les compétitions dont j’avais perçu les limites, ainsi, d’ailleurs, que les miennes propres.


J’ai donc alors cherché du côté des disciplines affichées comme dédiées à la défense personnelle et j’explorais donc les Tai et Jiu-Jitsu ou encore le Sambo. Mais là encore, la richesse du baguage technique proposé, sensé pouvoir faire face à toutes les attaques possibles paraissait bien difficile à mettre en œuvre en situation.


Quelques pionniers ont alors proposé une vision plus réaliste et j’ai suivi, un temps les enseignements de Charles Joussot et Robert Paturel. Puis, plus tard et grâce à des amis Belges, j’ai eu la chance de participer aux stages de Fred Perrin et de l’ACDS dans sa version originelle inspirée par Fred.


J’y ai rajouté le travail du bâton irlandais (Bataireacht) qui s’intègre parfaitement aux principes.


J’enseigne maintenant depuis 31 ans


3- Quelles sont les personnes qui t’ont influencé dans ta pratique et ta vision du combat ?

D’abord je tiens à remercier sincèrement ceux qui se sont introduit chez ce gamin fluet et rêveur et qui lui ont permis de prendre conscience des réalités de la vie. Merci aussi à chacun de mes nombreux enseignants qui m’ont tous appris quelque chose . Mais je garde une pensée particulière pour mon premier professeur de Karate, Laurent Saidane, membre de la célèbre équipe de France, avec Valéra, Paschy, Petidemange, Gruss, etc … Il était le plus léger de l’équipe mais prenait en combat contact tous ceux qui venait le visiter (plutôt le défier), marines américains, légionnaires, boxeurs, qui lui rendaient souvent 20 ou 30 kilos. Aussi Maître Tamas Weber pour son Karate très opérationnel et rude malgré une grande gentillesse et sollicitude. Sa méthode de self-défense pratique fut la première que j’ai enseignée. Christian Bruzat qui représentât longtemps le Sambo en France, technicien pluridisciplinaire hors pair et qui me présentât cette discipline dans toute sa richesse et que je finis par enseigner.


J’ai suivi l’enseignement ou participé à des stages avec de nombreux grands noms nationaux ou internationaux. Des pionniers Français comme Charles Joussot ou Robert Paturel m’ont impressionné avec leur rupture avec le : « s’il fait ceci, je fais alors cela ». J’ai aussi été très intéressé par l’approche de Lee Morrison que j’ai fait venir deux fois ou encore de celle de Rich Dimitri, Marc Mc Young, Mike Janich, Kelly Mc Cann. Mais c’est Fred Perrin qui demeure ma référence.


4- Nous nous connaissons depuis environ 20 ans et nous avons participé à plusieurs stages de « Protection Personnelle / Combatives » dirigé par Fred Perrin. Aujourd’hui, ou en es-tu dans ta pratique ?

Comme je le disais plus avant, étant confronté moi-même depuis près de 40 ans à des situations délicates c’est l’enseignement des principes de Fred que je trouve le plus adapté et c’est ce que je continue à pratiquer et à enseigner. Bien sûr mâtiné de mes expériences et agrémenté de recherches qui me sont plus personnelles. Parmi elles, le travail du Bataireacht et du Kukri, le célèbre grand couteau Népalais.Je travaille aussi beaucoup avec différents sabres, Européens comme la Shashka Russe ou Thaïlandais.



Je travaille aussi en Chi-kung et Tai-Chi pour lesquels je suis des cours particuliers et m’intéresse de plus en plus à la Médecine Traditionnelle Chinoise.


5- Outre la passion des couteaux que nous avons en commun, nous en avons également une autre : le « stick fighting ». Tu as choisi de te spécialiser dans le combat au stick Irlandais, peux-tu nous en dire plus ?

J’ai d’abord découvert l’objet, le Shillelagh (Bata en gaélique Irlandais) à travers les réalisations de Liam O’Caidlah un des plus célèbres facteurs Irlandais. Le premier me fut offert par un ami qui savait mes problèmes de santé et voulait m’encourager à garder un esprit martial malgré l’obligation d emarcher avec une canne. Puis, j’ai recherché des sources de l’Irish Stick Fighting (Bataireacht en Gaélique Irlandais). Malhreusement, la pratique avait quasiment disparue en Irlance. et ce sont principalement des membres de la Diaspora à travers le monde qui ont permis de découvrir ou redécouvrir ce patrimoine martial. Au premier rang desquels figure l’universitaire Canadien d’origine Irlandaise, John W. Hurley qui a écrit une véritable bible : Shillelagh, the Irish fighting stick et qui citait la famille Doyle, installée comme lui au Canada, comme une des seules lignées ininterrompues de pratiquant. J’ai alors contacté Glen Doyle avec qui j’ai échangé longuement puis qui m’a dressé à son représentant d’alors en Europe, Hendrik Rôber, un Allemand. Parallèlement j’ai aussi contacté des pratiquant Irlandais de diverses disciplines cherchant à retrouver le patrimoine martial natif mais à travers le prisme de disciplines plus exotiques et je n’ai pas donné suite. Après plusieurs stages et des échanges constant j’ai pu intégrer dans mes cours une partie de recherches pratiques incluant le Shillelagh et je continue toujours.


J’ai aussi eu l’insigne honneur d’animer quelques stages pour présenter la pratique à nos compatriotes.



6- Ou pouvons-nous te croiser pour des cours ou un stage de combat au bâton Irlandais ?

J’ai eu plusieurs salles sur Marseille et dans le Vaucluse mais là, je me concentre sur l’espace sportif que j’ai créé au sein de mon administration et où je donne cours. J’ai en projet quelques stages si mon planning professionnel chargé m’en laisse l’occasion. J’envisage aussi de tirer partie de l’expérience acquise lors de la pandémie pour donner stage en vidéo simultanément dans plusieurs clubs pour pallier justement ces difficultés de déplacement.


7- Tu as co-écrit un manuel dans le domaine de la Protection Personnelle nommé « R.E.P.E.R.E.S », peux-tu nous dire pourquoi avoir écris ce manuel et dans les grandes lignes, que pouvons-nous retrouver dans celui-ci ?

J’ai écrit la première version de R.E.P.E.R.E.S. (Règles Élémentaires de Prévention dEs Risques liés à la violEnce en Situation) en 2005. J’avais sollicité la relecture et les conseils d’Éric Henrion (Capitaine de police), Fred Bouamache lui aussi fonctionnaire de Police et futur co-auteur de PROTEGOR et de Fred Perrin. C’était un petit document de 16 pages sans une seule photo. J’avais souhaité proposer ce document en open source car il n’existait rien sur le sujet de la Protection Personnelle en langue Française. On y trouvait abordé :

  • des généralités sur le combat rapproché et les options d’évitement,
  • les risques au volant et dans la circulation,
  • les risques au domicile,
  • le rôle de la tenue vestimentaire en Self-protection,
  • la prévention et la défense contre les chiens,
  • le risque terroriste,
  • les holdup et prises d’otages,
  • les risques de vol avec ou sans violences
  • les principes juridiques de la légitime défense,

La deuxième version sortie en 2010 a été, elle, rédigée à trois mains et sous l’égide du CEETS dont j’étais alors président. L’acronyme était toujours le même mais nous avions changé le titre complet (Repérer Evaluer Prévenir Eviter les Risques En Situation).Il y eu deux co-auteurs principaux, Toujours Eric Henrion et Karine Martin alors secrétaire du CEETS et très impliquée dans ces sujets en tant que mère de famille. Fred Bouamache y a aussi participé ainsi que d’autres fonctionnaires de Police et des travailleurs sociaux.

Cette version est bien plus étoffée, illustrée de nombreuses photos et bénéficie d’une mise en page professionnelle.



8- Peux-tu me donner 3 principes de base de Sécu-Perso à appliquer au quotidien en milieu urbain ?

  • L’analyse de risques est probablement le plus important et valable où que ce soit. Soit compte tenu de tel mode de vie, telles conditions, telles activités de loisirs ou professionnelles qu’est-ce qui peut arriver le plus probablement et avec quel niveau de gravité. Cette analyse doit être menée avec lucidité, sans déni mais sans fantasmatique, non plus.
  • La vigilance et l’observation pour anticiper et réagir de façon opportune. Je rentre dans un lieu que je ne connais pas, je me place de façon à avoir un visuel sur qui rentre, j’ai repéré les issues de secours dédiées ou utilisables (fenêtre en rez de chaussée) près desquelles je me positionne de préférence, les objets et le mobilier autour de moi qui pourraient être utilisés pour me protéger (table, chaise, porte-manteaux) ou servir d’arme d’opportunité (verre, bouteille, vase). En cas de bagarre ou de mouvement de foule je me replie en guidant mes proches et en fermant la marche en checkant la situation en permanence. L’observation et la vigilance doivent être entraînés et très rapidement, on s’aperçoit qu’on a plus facilement une vision d’ensemble des situations et des interactions des acteurs. On pourra s’exercer en repérant le nombre, les tenues, les âges, les signes particuliers et le niveau de calme des personne présentes là où on se trouve. On s’apercevra peu à peu que cette « gymnastique » n’est pas du tout anxiogène et ne nous empêche pas de profiter d’un repas ou d’une conversation.
  • La préparation car le bon sens et l’observation ne font pas tout, il convient que l’observation et la vigilance amènent les actions opportunes au moment opportun. Pour ce, une formation à la protection personnelle et aux premiers secours sont des incontournables ainsi que l’emport d’un matériel minimal très bien maîtrisé et adpté aux risques à traiter (EDC).


9- Je sais que tu es un amateur de belles lames, peux-tu me donner ton top 3 de couteaux pliants et ton top 3 de couteaux fixes (industriel et ou custom) ?

Comme tu le dis, il ne s’agit que de ma vision des choses, MON top 3, en fonction de mes expériences d’utilisation et des modèles que j’ai utilisé.

Pour les pliants : 

  • Un Opinel N°9 à Virole (en photo un des premiers modèles avec la virole qui est encore en acier carbone) car simple, pas cher, léger et compact, polyvalent et très efficace avec son blocage de lame. Le couteau synonyme de passage d’enfant à apprenti adulte et mon premier couteau offert par mon Grand-Père, un sacré bonhomme.
  • Un couteau Suisse, génial et fonctionnel servant tous les jours pour de multiples tâches sans la crainte sociale parfois associée au couteau.
  • Un Filipino Hand Made Balisong, pour la rusticité et la fiabilité de sa cinématique qui le rend facile à réparer en mode dégradé.

Pour les fixes :

  • Un Kukri MKII réglementaire dans l’armée Britannique pendant la WWII, je développerai pourquoi ce choix si tu le souhaites.
  • Un Bowie de notre ami Fred Perrin avec une préférence pour son DRA Bowie custom, mais le FB04 qu’il a designé pour Spyderco n’est pas loin derrière. J’ai échangé à notre ami commun David Manise un DRA de Fred et un Seven d’un certain Tony Lopes, contre deux Busse raides neufs. Et je ne regrette pas une seule seconde cet échange. Le DRA m’accompagnait partout hors des sentiers battus et c’est très certainement celui que je prendrais pour remplacer mon vieux Camillius en situation dégradée
  • Enfin une griffe, toujours de Fred Perrin, dans un contexte plus urbain d’outil de secours toujours à portée de main et dont la fantastique ergonomie permet d’effectuer d’autres tâches sans jamais lâcher le couteau. J’en ai plusieurs de différentes formes et chacune à une destination, mais ma préférence va à un modèle custom à lame clip point à double tranchant. Je crois savoir, justement que tu as un modèle à venir designé en collaboration avec Fred et qui m’intéresse au plus haut point.

Ta limitation est réellement cornélienne et mon choix dicté par des impératifs pratiques. Car plus élargi j’y aurai ajouté un Neck Knife cutom et un splendide Bowie Shivaki Like de mon ami Xavier Conil, réalisé avec l’accord et les félicitations du Maître.




10- Restons dans le monde du couteau, pourquoi apprécies-tu particulièrement les Kukris ?

Un Kukri, c’est à la fois un camp knife, une hachette, une machette et une fantastique arme de combat rapprochée. Pour info, j’ai retrouvé des témoignages attestant que les célèbres Rangerss US de l’unité des Merill’s Mauders harcelant les Japonais derrière leurs lignes en Birmanie avec l’aide de la guérilla locale, avaient en dotation un Kukri. L’équilibre et le grip particuliers peuvent dérouter mais quand on l’utilise et pratique on en découvre peu à peu tout l’intérêt de cette lame recurve.

J’ai d‘ailleurs initié un groupe de recherche sur le sujet fort d’une trentaine de membres avec des aspects culturels, historiques mais aussi de travail du combat au Kukri.




11- Quels sont les outils qui composent ton EDC ? 

Par EDC j’entend la base de ce que j’ai sur moi et en plus de mes papiers, j’ai dans mon larfeuille :

  • Une plaque titane affutée derrière une carte de visite en ultimate back up.
  • Du tape enroulé sur une carte plastifié pour réparer, colmater, isoler électriquement, stabiliser un compressif de fortune.
  • Du liquide.

Dans les poches :

  • Un SAK Victorinox Forester qui a des outils de base solide, qui s’ouvre à une main et qui n’émouvra pas la maréchaussée.
  • Un ASP Key defender qui projette du spray OC et constitue un kubotan efficace (testé).
  • Un Sharky qui me permettra d’écrire sur un garrot ou tout autre support et fera un bon kubotan de fortune avec lequel on me laissera entrer absolument partout.
  • Une flashlight avec un bon ratio puissance/autonomie et, là aussi, avec laquelle je pourrai avoiner un malveillant.
  • Un paquet de kleenex qui fera un bon compressif en protégeant ma main du sang, palliera un ennui gastrique ou filtrera une flotte douteuse avec un peu de sable et de cendre.
  • Une pince pliante Leathermann très compacte.
  • Et, bien sûr un smartphone.

Sur mon trousseau de clés :

  • Un RESQ-ME pour briser une vitre et couper une sangle.
  • Une mini lampe de back-up pour voir et se signaler.
  • Un sifflet pour se signaler.
  • Un micro Spyderco.

Sauf milieu très surveillé, j’ai aussi toujours une griffe en neck.

Ceci étant pour la 1ère strate. En 2ème strate, j’ai du matériel complémentaire de premiers secours, d’hydratation et de protection thermique ainsi qu’un téléphone durci en back-up et une Leathermann Charge Ti, dans une sacoche (5.11 Covert zap 6).

La 3ème strate, c’est un sac à dos dans le coffre de la voiture, avec un rechange de vêtements solides et chaud, une paire de pompes pour marcher longtemps, un sac de couchage, un gros contenant à eau, quelques rations.


12- Peux-tu nous parler de tes futurs projets ?

Continuer dans les voies traditionnelles Chinoises par la pratique du Pakua et du Hsing Hi pour explorer l’interne. Je pense que cette recherche n’est pas antinomique avec mon travail très pratique. Multiplier aussi les échanges autours des recherches sur le travail au Kukri et le Bataireacht.

J’ai également un ouvrage sur la protection personnelle en préparation et je souhaite que mes dernières années d’activités professionnelles se réorientent vers la formation.

Enfin j’ai aussi quelques projets d'études universitaires que je n’avais pas pu mener à bien jusque là.



13- Quelle est ta devise dans la vie ? 

Elle tient en trois mots : la plume, le cœur et l’épée.

  • La plume pour apprendre, se libérer de la pensée des autres et transmettre ce qu’on a appris.
  • Le cœur pour l’attention aux autres et la détermination.
  • L’épée pour se protéger et défendre les valeurs socles sans être tributaire d’autrui.


14- Pour finir cette interview, je te propose de répondre aux questions « existentielles ».

- bâton ou couteau ?

Difficile de choisir une de ses deux jambes plutôt que l’autre, mais je dirais “couteau“, car avec un couteau je peux … me tailler un bâton où que j’aille.

- Irlande ou Philippines ?

Plus feu de tourbe que chaleur humide même si les Philippines sont magnifiques

- Sudiste ou nordiste ?

Difficile d’être aussi tranché, je peux être Savoie, Corse, Pays Basque, Connemara, Montana ou Highlands plutôt que Saint Tropez, Long Beach ou Courchevel. J’aime les endroit où les paysages et ceux qui y vivent ont une réelle identité jalousement protégée et qui ne se livre pas facilement.

- Victorinox ou Leatherman ?

Là aussi, les deux. Un Victorinox Forester One Hand tout le temps en poche car léger, très polyvalent et d’apparence pacifique complété par un Leathermann Charge Ti, plus complet, dans une poche de veste ou une sacoche.

- Ville ou campagne ?

Campagne, je n’aime pas le bruit et le monde dans les villes et je peux rester des heures immobile, au bord d’un lac du Connemara (un vrai pas façon Sardou).

- Pistolet ou revolver ?

Pistolet, Glock par pragmatisme et Colt 1911par nostalgie des armes de légende. Mais je suis aussi un fan inconditionnel et possesseur de Winchesters.

- Irish coffee ou café gnôle ?

Plutôt Guiness, en fait.

- Grey man ou tactical ?

Grey man un principe de vie parfois mal compris. On croit ainsi qu’il consiste à éviter à tout prix les problèmes alors qu’il s’agit en fait de ne pas générer l’agressivité et le défi sans jamais passer pour une proie facile.

- Gorka ou M65 ?

Là aussi, j’ai les deux mais M65 plus passe partout et polyvalent en ville.

- Et pour conclure : bouillabaisse ou moules-frites ?

Sans aucune hésitation malgré l’affection que je porte à nos potes Belges et Nordistes. C’est probablement la seule trace persistante de mes origines Marseillaises.



Merci à Patrick Vincent pour cette interview.

Retrouvez le sur sa page Facebook: https://www.facebook.com/clann.dair

mardi 14 juin 2022

VOL WEST aka LA BÊTE


1- Peux-tu te présenter en quelques mots ?

Je suis connu sur « internaze » sous le nom de Vol West…mais mes proches m’appel “la bête”.
J’arrive sur mes 50 ans cette année, donc grosse séance de récapitulation et surtout, une intense résolution de dynamiter le superflu dans ma vie et recentrer mon énergie sur du tangible rustique.

Je suis né et j’ai principalement grandi en banlieue parisienne: Vitry-sur-Seine, Villeneuve-le-Roi, Orly, Draveil…pour finir sur Paris a la porte de Vanves avant de partir pour Los Angeles après mon service militaire.

Seize ans a Los Angeles, ou j’ai principalement travaillé dans le bâtiment et la construction. Depuis maintenant 12 ans nous résidons dans l’état du Montana.




2- Tu as créé le blog « Le Survivaliste » en 2010, ce blog a été très longtemps une référence et une mine d’informations pour les survivalistes francophone. Quelles sont les choses de la vie qui-t-on orienté dans ton travail de recherche vers l’autonomie, l’indépendance et la résilience ?

Il n’y a pas d’événement particulier comme on pourrai le croire, mais plus une accumulation d’expériences et de sensations qui m’ont amenées a m’enraciner dans cette intention de résilience.
J’ai beaucoup grandi avec mes grands-parents. Au delà de leur expérience de la guerre, ils étaient très pauvres, ont eu une vie difficile, et sont mort très jeune. Cet univers a lui tout seul m’a énormément bouleversé et construit.


Ensuite Katrina et les émeutes de Los Angeles en 92 sont bien sur des événements qui ont largement participé a m’ouvrir les yeux sur la fragilité de nos structures sociales, hospitalières et logistiques. Vivre aux USA, sans réel filet de sécurité,  a aussi contribué a cimenter le développement d’une manière de vivre qui s’est naturellement orientée vers ce que nous nommons “survivalisme”.


3- Depuis combien de temps vis tu aux Etats Unis et pourquoi avoir choisi ce pays pour y vivre ?

J’ai immigré aux USA en 1994.

Mon oncle, avec qui j’ai grandi, vivait a l’époque a Los Angeles. Je suis venu lui rendre visite en 92, et durant cette visite je suis parti pendant quelques mois sur les routes du sud ouest américain seul et en auto stop. C’est durant ce voyage initiatique que je suis tombé amoureux du pays, des gens, de la culture, et puis peut être surtout de cette vibration “sauvage” présente aux USA.
Apres ce voyage je suis rentré pour faire mon service militaire, travailler pour mettre de l’argent de coté et repartir.


Je ne suis revenu en France qu’une seule foi en 28 ans.



4- Tu as vécu plusieurs années à Los Angeles, quels sont les raisons qui ton fait déménager dans l’état du Montana ? 

Dans les années 90 Los Angeles était encore une ville hors du commun et passionnante. Economiquement parlant, mon épouse et moi avions des boulots intéressants et largement lucratifs. D’une manière générale l’ambiance était bonne et nous pouvions tirer tous les avantages de vivre a Hollywood.
Petit a petit, et pour une multitude de raisons diverses et variées, l’ambiance s’est largement détériorée, et les conditions de vies aussi. Hausse importante de la criminalité, de l’immigration sud américaine et puis surtout de la pauvreté.
Los Angeles a toujours eu un coté obscure, mais la crise de 2008 a fait basculer la ville dans un univers néfaste, insalubre et finalement invivable.

Nous avons toujours eu le désir de sortir de LA a un moment ou un autre…et donc la décision était largement réfléchie. Nous avons établi une liste d’états et de petites villes qui reflétaient nos critères et Bozeman Montana s’est imposé comme le meilleur choix pour nous.



5- Je sais que tu consacres une grande importance au domaine du médic, peux-tu nous décrire les « outils » qui composent ton « Trauma Kit » ? Et si tu devais garder qu’un seul item, lequel choisirez-tu et pourquoi ?
Je pense effectivement que l’univers du médic est une porte d’entrée solide, utilitaire et réaliste de cette intention de résilience qui anime mon travail. Apres tout, nous sommes nous les civils toujours les premiers intervenants dans les rues: malaises, bastons, accidents du travail, terrorisme ou encore accidents de la route.

Aussi, et puisque je portes une arme a feu au quotidien, il me parait important d’avoir certaines connaissances médicales et pouvoir intervenir sur moi même, une tierce personne ou même un criminel après une confrontation.

La composition de mon kit est basique. J’y intègre des gants en Nitrile, une paire de ciseaux One Shear, une petite lampe frontale, un sac plastic Ziplock de 3 Litres avec un mètre de Duct Tape et un Sharpie comme outils périphériques. 

Le noyau dur, soit la partie “hémorragie”, inclus un CAT orange fluo de génération 7, un pansement compressif de 4 pouces de chez NAR et une bande hémostatique Celox Rapid. J’y intègre aussi deux pansements occlusif Hyfin Vent et un Epipen auto-injectable pour adulte.

Si je ne pouvais avoir qu’un seul élément j’intègrerai un Pansement “JUJU”…soit une bande élastique 4 pouces avec deux bandes de gauze. Avec cet outil je peux traiter une multitude de problèmes allant d’une cheville tordue a la pause d’un pansement compressif dans le cadre d’une hémorragie. C’est le truc médic le plus polyvalent et fonctionnel tout en restant sur du PVEPP.


6- Nous nous connaissons depuis de nombreuses années (la plupart des lecteurs le savent) et nous avons même créé il y a peu de temps une compagnie ensemble, peux-tu nous donner quelques infos sur cette compagnie nommé « Station IX » ?

Station IX est la matérialisation d’un univers particulier dans lequel toi et moi baignons depuis “toujours” mais peut être sans réelle structure. C’est la baston, la protection personnelle, la culture de l’arme, la psychologie de rue, la guerre, les NPE (Non Permissive Environment) les outils historiques, le combative, le rustique, la survie…

On retrouve ces éléments ici et la mais souvent ils sont séparés par le cloisonnement systématique de certaines disciplines, notamment a l’échelle martiale. Aussi, nous nous éloignons lentement mais sûrement d’époques et d’hommes plus rustiques.

A la base, Station IX fait référence a une branche spéciale du SOE durant la seconde guerre mondiale. Cette branche était principalement responsable du développement et de la fabrication d’outils et d’armes diverses et variées pour accompagner des hommes et des femmes parachutés derrières les lignes ennemies pour des missions de reconnaissance et de sabotage.

Un truc solide et carré, mais un peu décalé par rapport a la machine militaire traditionnelle. De la rue, du clandestin, de la survie, du combative, de la roublardise, du travail seul, de la technique, des astuces, du stratégique, du civile, du flingue…



7- En 2012, tu as co-écrit « Rues Barbares », (une deuxième édition est sortie il y a quelques années), pourquoi avoir écrit ce livre et pour qui ?

Rues Barbares est la réponse a une demande assez particulière de nos lecteurs: comment fait-on pour survivre a un effondrement quand on habite en ville ?

C’est vrai que le sujet de la survie un temps soit peu “fin du mondiste” est souvent ancrée dans une stratégie non urbanisée. C’est très vite Robinson Crusoe. Il y a énormément d’ouvrages sur la survie en milieu naturel, mais très peu sur la survie en appartement avec trois gosses, un chat et mémé dans une mégapole de plus de 3 millions d’habitants.

Avec Piero San Giorgio nous nous sommes donc donné le défi de contribuer a l’ébauche de solutions pratiques pour peut être survivre a une situation d’effondrement ou d’austérité systémique en milieu urbain.

Il est d’ailleurs intéressant de voir aujourd’hui, au travers de la guerre en Ukraine, l’importance d’un tel travail.


8- Quels sont les objets de base qui composent ton EDC ?

Plus je vieilli et plus mon EDC doit être léger et compact. Si il y a toujours des outils périphériques que je peux transporter souvent dans un petit sac a dos de merde, ma base est avant tout sur ma personne.

Avant de parler Ninja et meurtre, ma base absolue reste mon portable, une paire de gants en Nitrile dans ma poche arrière gauche et du liquide. Je suis d’ailleurs souvent étonné de voir la disparition de la présence du cash comme outil de survie dans les poches de mes contemporains.

A une époque sur le blog j’avais beaucoup poussé mon concept des 3L: Lame, Lampe, Lacrymo.
J’aime toujours bien en terme de base avec la possibilité de toujours adapter les 3L selon qui on est, ou on est et ce qu’on fait. Chaque individu aura sa version des 3L, avec un choix différent de lampe, de surin et de lacrymo selon l’ambiance.
Je peux passer d’une photon a faisceau rouge autour du cou et un petit Push de chez Cold Steel a une Surefire et notre No.2 par exemple.
La Lacrymo en OC reste un outil viable quelque soit l’environnement. Ca marche sur les clébards et les clochards. En fog, j’aime bien avoir l’option de condamner un couloir de métro derrière moi ou une cage d’escaliers. Pareil si baston générale en mode “bon samaritain”…je peux juste arroser tout le monde pour faire cesser la rigolade.

Apres je suis très flingue. J’oscille entre deux ou trois outils, mais en urbain et pour du quotidien, je suis principalement sur un revolver en 22LR avec un clip intégré.

Le 43C de chez Smith reste pour moi le meilleurs outils de défense personnelle pour un civil et quand c’est pas la guerre.



9- Peux-tu nous parler de tes futurs projets ?

En ce moment je suis très investi sur Station IX. Nous avons par exemple des projets assez ambitieux notamment en terme de manuels / livres.


10- Tu possèdes plusieurs cordes à ton arc dans le domaine professionnel, dont le métier de charpentier. Penses-tu que ce type de métier artisanal est-il encore pertinent aujourd’hui dans la « matrice » ou tout se règle avec un smartphone ? 

Non seulement je pense que ces métiers sont pertinents, mais je pense surtout que ce sont des métiers d’avenir.

A partir des années 70/80 le système a commencé a calculer les métiers manuels comme des métiers d’abrutis. Si tu n’étais pas bon a l’école, alors tu étais mis a l’écart sur des voies manuelles comme les CAP et les BEP par exemple. Seuls les “bons” continuaient sur les voies traditionnelles du BAC et des FACs.


Quelle violence.

Agriculteur, menuisier, mécanicien, boucher, électricien ou encore plombier sont justement des métiers intimement liés a cette intention de rusticité et d’indépendance. 






11- Quel est ta devise dans la vie ?

"Become harder to kill"


12- Après toutes ces années, tu continues de partager sur Instagram et Patreon tes recherches et ton travail dans le domaine du « survivalisme », quelles sont tes motivations ?
C’est une question difficile parce que les petites motivations qui peuvent survenir au quotidien changent selon les sujets abordés…mais je dirais que la principale motivation reste la transmission.


Contrairement a l’éducation, transmettre est un geste décisif aujourd’hui, surtout sur des sujets difficiles et interdits.


13- Pour finir cette interview, je te propose de répondre aux questions « existentielles »

- Glock 19 ou Smith & Wesson 43C ?

G19. Comme je le dis plus haut, le 43C est un outil fantastique mais dans un contexte particulier. Si je ne pouvais avoir qu’un seul flingue, ce sera un G19.

- Piles AA ou AAA ?

AAA ! Parce que PVEPP !

- Balisong ou OTF ?
Balisong. C’est le seul pliant qui ne peut pas se refermer sur les doigts.

- Potager ou poulailler ?
C’est dur. Poulailler ! Simplement parce que j’adore les animaux et surtout les poules.

- Calibre 22lr ou calibre 12 ?

22LR parce que PVEPP !

- Poule ou abeille ?
Je viens de te le dire ! Poules !

- Essence ou propane ?
J’adore le propane…mais l’essence reste le truc fondamental. Et puis tu peux faire des grenades du pauvre avec !

- Les montagnes du Montana ou les plages de Los Angeles ?
Sans aucun doute les montagnes. J’aime pas le chaud. J’aime pas le sable. J’aime pas la mer. J’aime pas les gens = la bête.

- Levis ou Carhartt ?
Levis. Parce que c’est ce que je portes au quotidien et que ca reste le pantalon qui passe partout, de la maison blanche aux bas quartier de Sierra Leone.

- Et pour conclure : cookies ou sushis ?
Cookies. Sans les petits gâteaux, je ne suis qu’un monstre.



Merci à Vol West pour cette interview.

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